Le titre de cet article n’assume que son sens littéral. Il parait qu’en Tunisie, nous ne savions pas ce que veut dire le geste d’applaudir avant 1846.
Cette forme d’expression contagieuse et collective semble pourtant primaire, naturelle et commune à toutes les cultures du monde avant qu’une poignée de scientifiques ne s’y penchent pour jeter des lumières sur son histoire et ses usages. Si dans le monde occidental, ses origines remontent à l’antiquité gréco-romaine, son sens a depuis bien changé. Dans De Oratore, Ciceron rapporte que les Romains applaudissaient en signe de mécontentement et de désapprobation. Explauderer, le composé latin du mot, signifie « chasser [un acteur] par des battements de mains » (Victoroff, 1956).
C’était lors d’une représentation théâtrale en France
Le livre « Ithafahlez zamane bi akhbar moulouk Tunis wa ahdel aman » (1862-1872) de l’historien des beys de Tunisie Ahmed Ibn Abi Adhiaf, révèle qu’avant la moitié du XIXe siècle les Tunisiens ne connaissaient pas l’applaudissement. C’est en France que Ahmed Ier Bey et Ibn Abi Adhiaf ont fait la découverte des claquements de main, «signe d’approbation chez eux», décrit l’historien dans son livre.
« Lors de la visite qu’il fit en compagnie du roi tunisien en France en1846, ils furent conviés à une représentation théâtrale par le roi Louis Philippe. Ce fut la première fois que des Tunisiens découvrirent visiblement aussi bien le théâtre que les applaudissements »
Ben Farhat Soufiane, 2008
Références :
David Victoroff, L’applaudissement : Une conduite sociale, L’Année sociologique (1940/1948-), Troisième série, Vol. 8 (1955-56), Presses Universitaires de France, pp. 131-171.
Ben Farhat Soufiane. Des origines à nos jours, le théâtre tunisien, missionnaire et d’avant-garde. In: Horizons Maghrébins – Le droit à la mémoire, N°58, 2008. Le théâtre arabe au miroir de lui-même – Œuvres de l’artiste marocain Hassan Bourkia et texte du romancier et critique d’art Edmond Amran El Maleh. pp. 106-114.